SENSIBILISATION & DROITS

UN AVEUGLE PEUT-IL SIGNER UN DOCUMENT ?

par Sir John Wall, ex-Président du Conseil Exécutif du RNIB britannique et de l'Union Européenne des Aveugles.

La réponse à la question posée est et doit être "oui". En effet, signer un document constitue un droit civil fondamental et, sans lui, l'individu ne peut être un citoyen de première catégorie. Cet article a pour objectif d'expliquer pourquoi et quelles sont les difficultés évidentes ? Quelles sont les normes qui nous permettent de surmonter ces difficultés ?

"Qui est l'aveugle"? 

Ceci inclut toutes les personnes dont la vision est si limitée qu'elles ne peuvent lire un document, pas même avec un dispositif d'aide pour pallier ce manque de vision.

Lire et écrire sont des habiletés qui s'apprennent. Il fut un temps, même dans les pays que nous disons développés, où beaucoup ne savaient ni lire ni écrire : ils étaient analphabètes. Ils se trouvaient dans une situation comparable à celle des personnes aveugles, selon la définition apportée au paragraphe précédent. Il a alors fallu établir des normes pour que les analphabètes puissent signer des documents. La solution était qu'une personne leur lise le document, après quoi ils signaient normalement avec un "x" ; la personne qui avait lu le document, signait comme témoin, et déclarait que "x" était la marque de la personne qui l'avait signé, et qu'elle en connaissait le contenu. Le premier pas qu'un aveugle devrait faire, si cela est possible, c'est d'apprendre à signer. Mais si l'on n'a jamais vu, on peut, et on doit, leur apprendre à écrire leur nom ; en Angleterre, nous disposons de patrons qui nous le permettent. Écrire son propre prénom n'est pas complètement fondamental ; on peut utiliser l'ancienne marque, comme le faisaient les analphabètes.

La réponse au « Pourquoi signons-nous des documents ? », dépend de la nature de ces derniers. Il peut s'agir d'un accord légal que nous souhaitons formaliser ; il peut s'agir d'un ordre que nous souhaitons transmettre à la banque ou un reçu de carte de crédit ou encore, d'un testament. Mais indépendamment du type de document, il faut avoir connaissance de son contenu avant de le signer ; il faut donc que quelqu'un le lise à la personne non-voyante. Certains aveugles considèrent que cette forme est fastidieuse, mais elle est néanmoins logique: qui souhaiterait s'engager à quoi que ce soit sans connaître les répercussions que ceci implique?

Dans le cas de la plupart des documents que l'on signe, il n'est pas nécessaire d'avoir un témoin. Lorsque vous savez ce que le document contient, vous le signez simplement. Votre banque vous connaît et reconnaît votre signature ; ils savent que vous êtes sensé et que vous ne signeriez jamais un chèque sans connaître le nom du bénéficiaire et la somme qui y est écrite ; c'est pour cela qu'ils ne vous dérangent pas pour vous demander si vous avez pris les précautions évidentes. Mais certains documents exigent que l'on certifie la signature. C'est normalement le cas lorsque le document revêt une importance spéciale, comme l'acte authentique de vente d'un immeuble ou bien un testament. Le témoin a pour fonction de démontrer que c'est vous qui avez signé; ainsi, le témoin constate que c'est vous qui signez, puis il signe ensuite. Il n'a pas à vous connaître mais si, par la suite, on met en doute que c'est vous qui avez signé le document, il peut comparaître devant le tribunal pour démontrer qu'il se trouvait présent et qu'il vous a vu signer. Lorsqu'une personne atteste la signature d'une personne aveugle, il ajoute habituellement une note qui indique qu'on lui a lu le document et que la personne aveugle a confirmé qu'elle comprend son contenu.

Néanmoins, on ne peut obliger une personne à témoigner à l'encontre de son conjoint, et il ne doit donc pas être témoin. On ne demande normalement pas à un parent ni à une autre personne trop jeune ou trop âgée, de certifier une signature.

Mais qu'en est-il pour les aveugles ? Peuvent-ils être témoins ?